Au-delà des cibles : Pleins feux sur Thaidene Nëné
Le rapport Au-delà des cibles du WWF-Canada propose un nouveau modèle pour l’établissement d’aires protégées et de conservation (APCA) au pays – un modèle qui priorise l’avancement des aires protégées et de conservation autochtones et les droits et titres autochtones, ainsi que les régions qui soutiennent des solutions basées sur la nature pour la biodiversité et le climat.
On y donne en exemple quatre APCA, dont Thaidene Nëné, qui se traduit par « Terre des ancêtres » en Dënesųłiné Yati et s’étend sur plus de 26 000 km2 dans les Territoires du Nord-Ouest.
Situé à la transition entre la forêt boréale et la toundra, le territoire inclut le bras est du grand lac des Esclaves, la source d’eau douce la plus profonde en Amérique du Nord. Thaidene Nëné abrite une variété d’espèces allant du grizzli au loup et à l’orignal.
Désignée APCA en 2019 par la Première Nation Łutsël K’é Dene en vertu du droit Déné, et par l’établissement d’accords avec Parcs Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, l’APCA comprend une réserve de parc national (14 305 km2), une aire protégée territoriale (8906 km2) et une aire de conservation des espèces (3165 km2) – chacune possédant sa propre législation. L’APCA est cogérée par les gouvernements autochtones et de la Couronne pour conserver l’héritage naturel et culturel de la région.
Contenu relié
Pleins feux sur l’aire protégée et de conservation autochtone Aqviqtuuq
Pleins feux sur le delta de la rivière Saskatchewan
Pleins feux sur le bassin versant de la rivière Seal
Ci-dessous, Steven Nitah, de la Première Nation Łutsël K’é Dene, partage son point de vue sur cette région importante. Tel que raconté à Haley Lewis.
« Enfant, j’ai souvent changé d’endroit. Ma famille suivait les saisons, les cycles de chasse et de cueillette. En été, nous chassions le caribou dans la toundra, puis nous revenions vers la communauté à la fin aout pour sécher le poisson que nous avions pêché en prévision de l’hiver.
À l’automne, nous allions dans la forêt boréale pour chasser et trapper le lynx, le vison et d’autres animaux à fourrure, et quand l’été revenait, le cycle recommençait. C’est comme ça que la famille a grandi. Aujourd’hui, c’est différent. Les gens sont éparpillés dans tout le pays, mais il y a toujours le territoire ancestral auquel revenir, et je suis fier de dire que c’est un territoire que j’aide à protéger.
En tant que membre de la Première Nations Łutsël K’é Dene, j’ai servi de négociateur en chef pour Thaidene Nëné, une aire protégée et de conservation ici, aux Territoires du Nord-Ouest.
Ma communauté et moi, on a toujours eu une relation profonde avec l’environnement, la nature et le territoire qui constitue Thaidene Nëné. C’est une relation interconnectée, réciproque et qui définit qui nous sommes en tant que peuple, qui définit les systèmes de savoir que nous utilisons.
Protéger Thaidene Nëné
Établit en 2019, Thaidene Nëné est au cœur du territoire ancestral des Łutsël K’é Denes. Il mesure plus de 26 000 km2 – ce qui n’est pas banal – et est protégé en vertu de la loi Łutsël K’é Dene. Mais cette protection n’est peut-être pas celle que vous croyez – il s’agit moins de gérer le territoire que de gérer les humains.
La terre va faire ce qu’elle veut et c’est notre travail de ne pas la surgérer. Là où la gestion sur le terrain est requise, nous utilisons le savoir écologique traditionnel autochtone et le savoir local combinés avec la science d’aujourd’hui.
Et malgré que tout semble bien et bon – et ça l’est – il n’a pas été facile d’établir Thaidene Nëné comme APCA. C’est un territoire minier – une grande partie de l’économie des Territoires du Nord-Ouest compte sur l’extraction de ressources – donc y préserver un territoire de cette taille a été difficile à comprendre pour beaucoup de personnes, les gouvernements et l’industrie.
L’APCA représente une nouvelle relation entre les gouvernements autochtones et la Couronne. Le mandat qui a été donné était de mettre en œuvre l’esprit de l’intention avec laquelle nous avons accepté le traité, c’est à dire de partager la terre, ses bénéfices et la responsabilité de sa gestion. Nous y sommes arrivé.e.s à travers une entente avec Parcs Canada et le gouvernement territorial.
Les Nations unies nous ont même remis un prix indiquant que c’est un bon projet et un modèle digne d’être reproduit. Thaidene Nëné est un lieu que nous savons devoir défendre et il faudra lutter pour sa protection sur une base continue. Le protéger est cohérent avec notre mode de vie et il continuera ainsi de nous offrir l’occasion d’être des Déné.e.s en pensant à l’avenir du territoire. Il y a des choses qui sont hors de notre contrôle.
Nous réfléchissons constamment à des façons d’atténuer les impacts des dérèglements climatiques. Nous savons que si nous ne gérons pas ces impacts, les incendies, ils seront nuisibles – mais présentement, nous n’avons pas les ressources financières pour les gérer. Thaidene Nëné, comme toutes les APCA, devrait être un endroit où les peuples autochtones peuvent faire l’exercice de leurs droits et de leurs responsabilités.
Nous avons besoin des ressources financières pour créer des occasions de réconciliation économique, territoriale et culturelle, afin de pouvoir utiliser nos visions du monde et nos systèmes de savoir pour gérer les territoires à travers la nation. »