Comme un poisson dans l’eau!

Par Mathieu Lebel, Conseiller en gestion de l’eau, WWF-Canada
Je vais vous révéler un secret : les « Pandas » (employés) du WWF-Canada adorent l’esturgeon jaune (ou de lac), tant et si bien qu’ils en ont adopté 12 le printemps dernier!
Il y a environ un an, j’ai participé à la rédaction d’un blogue expliquant brièvement pourquoi ce poisson est si fascinant et à quel point j’étais privilégié de pouvoir me joindre à une équipe de chercheurs pour une expédition de marquage de spécimens et de collecte de données sur les esturgeons jaunes de la portion albertaine du bassin de la rivière Saskatchewan Sud.
Le printemps dernier, ma collègue passionnée d’esturgeons Stephanie Morgan et moi-même avons entraîné plusieurs « Pandas » du WWF dans une aventure de recherche et de conservation des esturgeons jaunes, dans le cadre du programme « Adoptez un esturgeon » du Greater Nipissing Stewardship Council (GNSC).
Ce programme permet aux « parents adoptifs » d’observer le processus de marquage des esturgeons, d’obtenir des renseignements biologiques sur ce poisson et de recevoir une mise à jour de l’évolution de « leur » esturgeon à chaque fois qu’il sera recapturé au cours des prochaines années. Les sommes recueillies grâce à ce programme soutiennent les efforts de conservation des esturgeons jaunes que mène le GNSC.
Cette année, le programme « Adoptez un esturgeon » se poursuit en collaboration avec le Natural Resources Department de la Première Nation de Nipissing dans le cadre d’une évaluation continue de l’état de santé de la population d’esturgeons adultes. Cette évaluation consiste à tenir un registre de l’âge, de la taille, du sexe et du nombre de poissons frayant au moment de leur capture, ainsi qu’à les marquer d’une étiquette d’identification par radiofréquence (RFID). J’ai eu la chance de travailler tout un après-midi sur la rivière Sturgeon (la rivière aux Esturgeons, comme il se doit!) à Sturgeon Falls (décidément!), en Ontario, aux côtés des chercheurs Nikki Commanda, Jeff McLeod et Clayton Goulais du Natural Resources Department, ainsi que du président du GNSC John Thornton.

Des chercheurs de la Première Nation de Nipissing mesurent un esturgeon jaune adulte © Mathieu Lebel / WWF Canada

J’ai alors eu l’occasion de participer au processus d’évaluation. Après avoir pêché le poisson délicatement à l’aide de grands filets, nous en mesurons la taille et le poids, nous prenons une photo de chaque spécimen et marquons ceux qui n’ont jamais été capturés, puis nous les relâchons dans la rivière. L’esturgeon jaune est une espèce si exceptionnelle, si fascinante, qu’il m’est difficile de décrire toute la gamme d’émotions que j’ai ressenties à les voir évoluer et à interagir avec eux. Trois des spécimens attrapés et relâchés ce jour-là pesaient plus de 36 kilos et mesuraient de 1,6 à 1,9 m de long! Il va sans dire que c’étaient parmi les plus gros poissons que j’aie jamais vus. On peut difficilement déterminer l’âge d’un esturgeon sans prélever un échantillon de tissu à partir de sa nageoire, mais l’esturgeon jaune peut vivre plus de 100 ans. C’est vraiment incroyable de penser qu’il y a des esturgeons jaunes qui nagent dans nos lacs et rivières et qui peuvent être aussi vieux, sinon plus vieux que vous et moi – un véritable patrimoine d’eau douce vivant et un précieux héritage à laisser aux générations futures.

Me voici en train de relâcher un esturgeon jaune de 17 kilos dans la rivière Sturgeon © Nikki Commanda.

Les esturgeons jaunes de cette région appartiennent à la population d’esturgeons jaunes des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent, désignée comme étant menacée par le COSEPAC et le COSSARO. Le gouvernement fédéral envisage en ce moment d’inscrire ces populations dans son registre des espèces en péril, tandis que l’Ontario a élaboré une stratégie de rétablissement et devrait publier sous peu un plan d’action gouvernemental.