L’impact d’IMPAC5 : la cause de la protection marine progresse au congrès mondial sur les océans à Vancouver
Pour véritablement contribuer à préserver la vie marine et à lutter contre les dérèglements climatiques, la protection des océans doit aller au-delà de simples lignes tracées sur une carte.
C’est l’un des principaux thèmes qui est ressorti lors d’IMPAC5, un congrès mondial sur les océans qui s’est tenu à Vancouver du 3 au 9 février. Le Canada, pays hôte de l’événement, a montré l’exemple en annonçant des progrès concernant plusieurs aires marines protégées (AMP) dirigées par les Premières Nations le long de la côte de la Colombie-Britannique et en dévoilant une nouvelle « norme de protection » pour les AMP fédérales.
Des représentant.e.s du WWF-Canada étaient présent.e.s, aux côtés des peuples autochtones et de professionnel.le.s des océans du monde entier, pour partager des connaissances alors que nous traçons collectivement la voie vers une protection réfléchie du tiers de nos océans d’ici 2030.
Une vague déferlante
En 2015 encore, moins de 1 % des aires marines et côtières du Canada étaient protégées. Aujourd’hui, ce chiffre s’élève à 14,66 % et devrait atteindre la cible de 25 % au cours des deux prochaines années.
Comment y parviendrons-nous?
Lors d’une annonce conjointe à l’occasion d’IMPAC5, le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, et la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, Joyce Murray, ont présenté la Voie du Canada vers 2025. Ce plan prévoit la conservation de 17 zones – toutes à différents stades de préparation – d’ici 2025.
Parmi ces zones, on retrouve le Dernier refuge de glace, Tuvaijuittuq, qui signifie « l’endroit où la glace ne fond jamais » en Inuktitut; l’ouest de la baie d’Hudson et l’ouest de la baie James, une aire marine proposée adjacente à l’une des plus grandes réserves mondiales de tourbières riches en carbone; et la baie Witless, une zone située au large de la côte est de la péninsule d’Avalon, à Terre-Neuve, qui sert d’habitat à des populations d’importance mondiale d’oiseaux de mer comme le macareux moine, la mouette tridactyle et le guillemot marmette.
La cogouvernance avec les peuples autochtones au centre de l’attention
Parcs Canada a donné le coup d’envoi de la conférence en annonçant une nouvelle politique concernant l’établissement et la gestion de toutes les aires marines nationales de conservation (AMNC) « actuelles et futures » qui souligne « l’importance de la collaboration et de la cogestion avec les peuples autochtones » pour préserver les écosystèmes vulnérables.
Cette volonté de placer les Autochtones au cœur de la conservation des océans s’est manifestée à maintes reprises au cours de la conférence d’une semaine, notamment lorsque les Premières Nations, la province de la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral ont fait part des progrès accomplis en matière de gouvernance collaborative des AMP le long de la côte ouest du Canada.
La première annonce concernait la biorégion du plateau Nord, aussi connue sous le nom de « zone marine du Grand Ours ». Le « plan d’action » dévoilé créera le plus grand réseau d’AMP au monde dirigé par des Autochtones et développé en collaboration avec eux, qui s’étendra sur 100 000 kilomètres carrés de fiords profonds, de récifs d’éponges siliceuses, d’estuaires côtiers et d’eaux océaniques fréquentées par des rorquals communs, des baleines à bosse et des orques.
« Notre capacité à nous rassembler en tant que peuple autochtone, comme nous le faisons depuis 14 000 ans, nous a conduit.e.s à cette position – où nous agissons ensemble », a déclaré Dallas Smith, président du Conseil Nanwakolas, lors de l’annonce.
Ce sentiment a été repris par le ministre de l’Intendance de l’eau, des terres et des ressources de la Colombie-Britannique, Nathan Cullen : « La seule voie de retour est une voie que l’on façonne ensemble, que l’on parcourt ensemble. »
Plus tard dans la journée, la création du premier refuge marin dans la biorégion du plateau Nord a été annoncée. La zone de Gwaxdlala/Nalaxdlala, située dans l’inlet Knight sur la côte de la Colombie-Britannique, abrite un écosystème unique au monde de coraux fragiles et à croissance lente et a été désignée aire protégée et de conservation autochtone par la Première Nation Mamalilkulla en 2021.
De plus, le 7 février, le Conseil de la Nation Haïda, le Conseil tribal de Nuu-chah-nulth, la Première Nation Pacheedaht et la Première nation Quatsino ont annoncé conjointement qu’un protocole d’entente avait été conclu avec le gouvernement fédéral au sujet de l’aire de protection marine proposée Tang.ɢwan-ḥačxʷiqak-Tsig̱is (officiellement connue sous le nom de zone extracôtière du Pacifique).
Nommée en l’honneur de ses monts sous-marins et de ses bouches hydrothermales, cette oasis des profondeurs de 133 000 kilomètres carrés accueille des espèces qui n’existent nulle part ailleurs.
Placer la barre plus haut
Au fil des ans, des dizaines de milliers de Canadien.ne.s se sont joint.e.s au WWF-Canada pour réclamer des normes plus strictes en matière de protection marine. Vous avez été 23 000 à contacter le gouvernement pour demander une interdiction complète du déversement des déchets des navires dans les AMP.
Le Canada était à l’écoute.
« Nous pouvons tracer une ligne sur une carte, mais si nous ne disposons pas d’une protection efficace, qu’accomplissons-nous? », soutient la ministre Murray dans le cadre d’une conférence de presse qui dévoilait les nouvelles normes de protection des aires marines protégées.
Les nouvelles normes minimales précisent quelles activités sont permises ou interdites dans les AMP fédérales. On y stipule notamment l’interdiction des activités pétrolières et gazières, de l’exploitation minière et du chalutage de fond jusqu’à 200 milles marins des côtes.
Ces normes comprennent également des restrictions proposées sur les rejets par les navires d’eaux grises, d’eaux de lavage, d’eaux usées, de déchets alimentaires et d’eaux de cale, mais uniquement jusqu’à 12 milles marins en raison de contraintes de souveraineté concernant la navigation internationale au-delà de cette zone.
Le WWF-Canada a félicité le gouvernement canadien pour ces mesures importantes et encourage le gouvernement à entreprendre des actions auprès de l’OMI pour étendre ces protections à toutes les AMP.
Au dernier jour du congrès, le Canada a demandé un moratoire sur l’exploitation minière des grands fonds marins (qui contribue au bruit sous-marin), s’est engagé à devenir le premier pays à protéger tous les monts sous-marins contre les pratiques destructrices comme le chalutage de fond et a promis de ratifier un traité sur la haute mer, une zone océanique qui ne relève d’aucun pays et représente environ les deux tiers des océans.
Nos actions
Les représentant.e.s du WWF-Canada ont pris part à des panels sur des sujets variés touchant notamment la compréhension de nos écosystèmes de carbone bleu, la modélisation du déversement des déchets des navires et la planification d’un réseau d’AMP dans l’Arctique centrée sur les connaissances, les conseils et l’expérience des Inuit.
Jimmy Ullikatalik et Peter Aqqaq, nos partenaires de l’Association des chasseurs et trappeurs de Spence Bay, à Taloyoak (NU), se sont également joints à nous. Ils ont partagé leurs points de vue sur la conservation menée par les Autochtones et sur le plan de la communauté pour l’établissement de l’aire protégée et de conservation inuite d’Aqviqtuuq dans le cadre de plusieurs panels. (Jimmy a aussi pu plaider sa cause directement auprès de la ministre Murray lors d’un évènement organisé pour les sympathisant.e.s du WWF-Canada.)
Dans l’ensemble, l’IMPAC5 a non seulement rapproché le Canada et le monde entier de la cible de protection de 30 % des zones marines et côtières d’ici 2030, mais il a également contribué à faire en sorte que cela se fasse de la bonne façon, en favorisant la progression de secteurs comme le carbone bleu pour lutter contre les dérèglements climatiques et en soutenant la conservation menée par les Autochtones pour se rapprocher de notre objectif commun de protéger les écosystèmes océaniques et les espèces en péril.
Le WWF-Canada se réjouit à l’idée de collaborer avec le gouvernement du Canada, l’industrie, les peuples autochtones et son réseau mondial pour renforcer les protections marines au pays et à l’étranger, afin que nos mers restent pleines de vie à l’avenir.